D’une seule voix, dépasser l’infranchissable mur

Affiche du film d'une seule voix
Affiche du film d'une seule voix

Faute de pouvoir démolir les murs qui séparent les hommes, certains cherchent à les dépasser. Quand toute communication semble impossible, certains cherchent à inventer d’autres moyens pour se retrouver sur l’essentiel, leur humanité. Quand le bruit des bombes remplit l’existence, certains cherchent à entonner des sons nouveaux. La réponse de ce film, c’est la musique, un langage qui aide à tisser des liens entre ceux que tout semble opposer.

Tout a commencé en 1994, en pleine guerre de Bosnie-Herzégovine, lorsque Jean-Yves Labat de Rossi avait tenté un exploit inédit: organiser un concert commun avec des musiciens serbes, bosniaques et croates. Sept ans plus tard, l’idée lui traverse la tête de rééditer l’aventure. Cette fois, il choisit d’autres protagonistes que la guerre sépare, Israéliens et Palestiniens. Le projet a mis quatre ans avant de se concrétiser. Ce n’est qu’en novembre 2004 qu’a lieu, à Jérusalem, le premier concert « D’une seule voix ».

Fort de ce succès à Jérusalem, Jean-Yves Labat de Rossi, décide d’organiser une tournée en France pour la même troupe musicale composée d’Israéliens et de Palestiniens, juifs, chrétiens et musulmans. La troupe va parcourir quatorze villes en France pendant trois semaines.

C’est alors l’occasion pour le documentariste français Xavier de Lauzanne de suivre cette troupe à travers les routes de France. Avec sa caméra, il va filmer ces musiciens en train de tisser des liens qu’ils n’auraient pas pu nouer sur leurs terres brûlées par la guerre. Il est tout simplement ce témoin privilégié qui va pouvoir raconter ce qui se passe dans les coulisses de cette tournée.

Au début, tout le monde semble se prêter au « jeu ». Mais cohabiter pendant trois semaines sur une terre étrangère n’est pas une chose acquise pour cette troupe d’artistes. Les tensions font surface, et les incidents, quoique isolés, se multiplient. Un musicien fait une citation d’un leader politique palestinien dans un discours et des chanteuses font le signe de la victoire pendant le concert. C’est sans doute quand la politique se mêle que les choses se compliquent.

Malgré ces tensions, les musiciens tentent de surmonter la difficulté, et, de se faire la paix quand les représentants de leurs peuples ne parviennent pas à s’asseoir autour de la même table. Ils sont plutôt disposés à apprendre à connaître celui qui est présenté, dans leur pays, comme leur ennemi. Pour cela, peu importe si les uns ne parlent pas la langue des autres. N’est-ce pas la musique est la seule langue universelle qu’ils peuvent utiliser pour communiquer et se connaître? Peut-être que la musique sera un extraordinaire lien entre ces êtres qui rien au départ ne semblait réunir, sauf la musique. Dans le film, une chanteuse le dit avec ses mots, une autre manière d’espérer : « Chanter le chant de ceux qui sont de l’autre côté empêche de les bombarder ».

En tout cas, à force de s’écouter et de jouer ensemble sur la même scène, les musiciens finissent par mieux se connaître, puis mieux se respecter. Un exploit. Avant de pouvoir s’aimer un jour, ne faut-il pas commencer par se connaître ? On en est loin hélas, de l’amour, mais avec ce film des liens naissent entre les deux camps, comme pour construire un pont entre les deux rives. Peut-être qu’un jour, ils pourront dépasser le mur qui les sépare, ou le détruire, tout simplement.

D’une seule voix. Documentaire français (2008) de Xavier de Lauzanne, avec Jean-Yves Labat de Rossi – 83minutes. Sortie en France le 11 novembre 2009.