Voir l’Iran autrement

Livres voir l'Iran autrement
Livres voir l'Iran autrement

De l’Iran, la conscience occidentale a deux images différentes, sinon presque contradictoires. Il y a d’abord celle de l’Iran d’avant la chute du Shah en 1979, image empreinte d’un héritage historique et culturel à la recherche d’une modernité « à l’occidentale ». Puis, il y a l’image de l’Iran d’après, celle des Mollahs qui gouvernent le pays et des femmes voilées. Bien des livres et des films, comme Persepolis, nous ont montré un Iran qui chavire entre ces deux mondes et visions. Mais depuis les dernières élections de 2009, l’on commence à voir un autre pays, celui-là est en plein ébullition.

Pour les amoureux de l’Iran et de sa culture, c’est une évidence, l’Iran a autre chose que son régime et son programme nucléaire pour qu’on s’y intéresse. Il y a aussi ses metteurs en scène qui osent produire, avec les moyens de bord, de très beaux films. Il y a également sa littérature vibrante, sa société marquée par le conflit, quoique assaillie d’ images de martyrs mais en même temps d’une communauté de bloggeurs, l’une des plus actives au monde. Il y a aussi ses nombreux artistes, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, connus dans le monde entier. De multiples facettes qui façonnent le visage de la société iranienne de nos jours.

Alors pour connaître cet Iran contemporain, voici deux livres, parmi bien d’autres, l’un écrit par deux auteurs iraniens et l’autre par une française vivant en Iran.

Transit Tehran

livre Transit TehranC’est un album anthologique très riche et composé d’images et de textes. Le livre commence par nous présenter l’histoire de la ville de Téhéran. Ensuite ce sont les femmes qui sont à l’honneur, avec des images aussi décalantes que surprenantes : des femmes à la beauté fatale se promenant une cigarette aux lèvres, le foulard négligemment glissé à l’arrière, des policières armées de revolvers et portant un tchador, ou encore ces femmes fans de football qui se battent pour pouvoir entrer dans un stade.

Le livre aborde les problèmes sociaux et urbains par des jeux de contrastes assez provocateurs dans le genre. Ici, on décrit une école coranique pour femmes pour arriver ensuite à un autre chapitre consacré à une série de photos de prostituées prises avant la révolution. Plus loin, on voit une série de peintures d’un artiste de l’intérieur, Khosrow Hassanzadeh, suivie des oeuvres à tendance plus érotique d’un artiste de l’exil, Nicky Nodjoumi.

Mais le livre ne se veut pas anti-islamique pour autant. Au contraire, il aborde l’aspect religieux de l’Iran avec respect et une touche plutôt glamour; notamment en donnant à un photographe la possibilité de montrer la vie d’un enseignant religieux. L’image du maître se reposant, entouré de jeunes étudiants souriants, veut montrer un autre aspect de cet Iran religieux.

Les pintades à Téhéran

Dans ce livre, les femmes iraniennes sont aussi à l’honneur. L’auteur, journaliste française installée en Iran, nous dresse Livre les pintades à téhéranun tableau de la vie quotidienne des iraniennes, leurs révoltes, leurs joies, leurs peines, leurs distractions mais surtout leur moral de plomb face au système installé par les religieux. Et contrairement aux idées et aux images que l’on peut avoir de l’Iran, les iraniennes sortent, s’amusent et draguent.

Sous leur voile, on découvre tout un autre monde plein de coquetteries avec un surprenant intérêt pour l’esthétique. Si vous pensiez que les brésiliennes étaient les championnes de la chirurgie plastique, allez-donc faire un petit tour du côté de Téhéran, vous risquez d’être surpris. Il suffit de pouvoir regarder sous le voile, mais ça, ce n’est pas donné à tout le monde, surtout pas aux hommes.

L’inventaire est complet. Presque rien n’y manque, il y a la business-woman implacable, l’insolente blogueuse qui raconte ses aventures intimes mais aussi qui s’exprime avec liberté sur bien d’autres sujets et la milicienne libérée… En d’autres termes, c’est le portrait d’un Iran tiraillé entre l’apparent rigorisme des mollahs et les appétits d’une jeunesse rêveuse de liberté. Le livre ne montre pas des photos, plutôt des dessins. Il est aussi muni des fiches pratiques, une sorte de guide de cet Iran souterrain qui bouge.