
L’IMEC, le nouveau corridor Inde–Moyen-Orient–Europe, vise à relier l’Inde à l’Europe via le Golfe à travers des infrastructures ferroviaires, énergétiques et numériques. Conçu comme une alternative stratégique à la route de la soie chinoise, ce projet redessine les échanges commerciaux mondiaux dans un contexte d’instabilité géopolitique.
Un projet d’envergure lancé au G20 de New Delhi
Annoncé lors du sommet du G20 en septembre 2023 à New Delhi, le corridor économique Inde–Moyen-Orient–Europe (IMEC) est un projet ambitieux visant à connecter l’Asie, le Golfe et l’Europe via une infrastructure multimodale.
Soutenu par l’Inde, les États-Unis, l’Union européenne, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, la France, l’Italie et l’Allemagne, ce mémorandum d’entente marque une étape clé pour le commerce international.
Les composantes principales de l’IMEC
- Un réseau ferroviaire pour réduire les délais de transport de marchandises (jusqu’à 40 % plus rapide que les routes maritimes actuelles).
- Des câbles numériques sous-marins pour une connectivité internet ultra-rapide.
- Des pipelines d’hydrogène vert pour soutenir la transition énergétique (notamment Israël–Chypre–Grèce).
- Des hubs logistiques intégrés, comme le port de Dubaï ou celui de Mundra en Inde.
Avec un investissement estimé à plusieurs dizaines de milliards de dollars, l’IMEC ambitionne de transporter 100 millions de tonnes de marchandises par an d’ici 2035.
Une réponse à la Belt and Road Initiative chinoise
Face à l’Initiative Belt and Road (BRI) de la Chine (plus de 1 000 milliards de dollars investis depuis 2013), l’IMEC se positionne comme une alternative portée par l’Inde et les puissances occidentales.
- Pour l’Inde : réduction de la dépendance aux routes dominées par la Chine (15 % de ses importations).
- Pour l’Europe : sécurisation de l’accès aux matières premières et diversification des partenaires.
- Pour les pays du Golfe : consolidation de leur rôle de carrefour logistique mondial (ports comme Jebel Ali).
Contrairement à la BRI critiquée pour son opacité, l’IMEC mise sur la transparence et des partenariats multilatéraux.
Les ambitions européennes : France, Italie et Chypre en pointe
L’Europe voit dans l’IMEC une opportunité stratégique pour renforcer son influence :
- France : port de Marseille-Fos comme porte d’entrée majeure (80 millions de tonnes de fret en 2024, volume pouvant doubler d’ici 2040).
- Italie : port de Trieste, promu comme hub logistique durable.
- Chypre : rôle de passerelle méditerranéenne. En juin 2025, la visite de Narendra Modi a confirmé un accord commercial Inde–UE attendu pour fin 2025.
Ces initiatives répondent à la volonté de réduire la dépendance aux routes vulnérables comme le canal de Suez, dont le trafic a chuté de 30 % en 2024.
Les défis : instabilité régionale et rivalités
Malgré son potentiel, l’IMEC affronte plusieurs obstacles :
- Conflits : guerre à Gaza et attaques houthis perturbant 12 % du commerce maritime mondial (hausse de 20 % des coûts de fret).
- Turquie : écartée du projet, elle promeut un corridor alternatif via l’Irak.
- Divergences d’intérêts : Inde tournée vers le commerce vs Europe préoccupée par la sécurité.
- Oppositions externes : Iran et Russie pourraient contrer l’IMEC via le corridor Nord-Sud.
La dépendance à une stabilité politique au Moyen-Orient reste un défi central.
Plus qu’un couloir commercial : un projet d’avenir
L’IMEC va au-delà du transport de marchandises :
- Énergie verte : pipeline Israël–Chypre–Grèce pouvant fournir 10 % de l’hydrogène vert européen d’ici 2035.
- Zones industrielles high-tech : développement de l’IA et des technologies de pointe en Inde et aux Émirats.
- Infrastructure numérique : connexion des data centers de Bangalore, Dubaï et Francfort.
Selon des projections, l’IMEC pourrait générer 2 à 3 % de croissance supplémentaire pour les économies partenaires d’ici 2040.
Comme l’a déclaré Narendra Modi en 2025 :
« L’IMEC n’est pas seulement une route, c’est un pont vers un avenir plus connecté et durable. »