Idée reçue N°3. Longtemps présentée comme une minorité marginalisée, la population arabe d’Israël incarne aujourd’hui une réalité bien plus complexe : une intégration progressive et réelle, certains diraient encore « imparfaite ». Artistes, médecins, députés, entrepreneurs : les Arabes israéliens ne vivent pas en marge du pays — ils en sont une composante vivante, essentielle et souvent exemplaire.
Une minorité nombreuse et visible
Les Arabes israéliens représentent environ 21 % de la population du pays, soit près de deux millions de citoyens. Ils parlent hébreu, votent, étudient dans les mêmes universités, et bénéficient des mêmes droits civiques et sociaux que les autres Israéliens. La Loi fondamentale garantit leur citoyenneté pleine et entière depuis 1948.
Mais leur histoire particulière — celle de familles restées sur place après la création d’Israël — en a fait une minorité longtemps tiraillée entre identité arabe et appartenance israélienne.
Ce dilemme existe encore, mais il ne se traduit plus par une exclusion systématique : la participation à la vie publique et économique progresse à grande vitesse.
Médecins, ingénieurs, entrepreneurs, députés : l’intégration par le travail
Dans les hôpitaux israéliens, près de 25 % du personnel médical est arabe : médecins, chirurgiens, infirmières. À Haïfa, Nazareth ou Be’er Sheva, les facultés de médecine accueillent chaque année davantage d’étudiants arabes — certains en tête de promotion. L’intégration économique se voit aussi dans la high-tech : plus de 9 000 ingénieurs arabes israéliens travaillent aujourd’hui dans les grandes entreprises du pays, du cyber au biomédical. (Estimation 2025, basée sur une croissance de 1 000 % depuis 2008). Le nombre total d’étudiants arabes en ingénierie a doublé en 6 ans (jusqu’en 2019), atteignant ~16 % des étudiants en STEM).
L’exemple le plus symbolique reste celui de Mansour Abbas, député et leader du parti islamique modéré Ra’am, qui a rejoint une coalition gouvernementale en 2021 — une première historique.
Ce tournant politique a brisé un tabou : être arabe et influencer directement la politique israélienne n’est plus une contradiction.
Artistes et culture : l’expression d’une double identité
La vitalité culturelle arabe en Israël dément également le cliché de la marginalisation. Des artistes comme Hannan Abu-Hussein, Maria Saleh Mahameed ou Mohammed Abu Salameh sont exposés dans les plus grands musées du pays, dont le musée d’art de Tel-Aviv. Ils parlent d’inégalités, de mémoire, de coexistence — mais depuis l’intérieur, pas depuis la marge. La littérature, le cinéma et la musique arabes israéliens ont trouvé leur place dans la scène nationale. Leur art témoigne d’une identité multiple, non pas effacée mais reconnue et discutée, reflet d’une société qui apprend à se regarder dans toute sa diversité.
Une égalité en construction, pas une illusion
Certes, il existe encore certaines disparités, comme dans d’autres sociétés occidentales et surtout arabes : on parle d’écart de revenus, urbanisme inégal, représentations médiatiques parfois biaisées. Mais parler de “citoyens de seconde zone” est complètement inexact. Il y a même des mesures et de lois de « discrimination positive » pour y remédier. Ce que révèle l’expérience arabe israélienne, c’est un modèle unique mais fonctionnel, bien plus égalitaire que n’importe quelle société arabe — un espace démocratique où la critique existe sans exclure, où la participation est possible sans reniement. L’intégration se mesure désormais moins en slogans qu’en faits :
- taux de scolarisation en hausse,
- croissance du nombre d’élus arabes,
- multiplication des entreprises mixtes.
La coexistence est une réalité quotidienne, faite d’interdépendances, de débats, et parfois de tensions, mais toujours de citoyenneté.
Focus Moyen-Orient.fr
L’idée que les Arabes israéliens seraient des “citoyens de seconde zone” relève d’un narratif politique, anti israélien, pas d’une réalité statistique. Ils ne sont ni isolés ni invisibles : ils soignent, enseignent, innovent, débattent, créent. Et c’est dans cette normalité partagée que réside, sans doute, le vrai visage de la coexistence israélienne.
Sources principales : Central Bureau of Statistics (CBS), Israel Democracy Institute, Taub Center, et études publiées en 2025 (ex. : Israel Journal of Health Policy Research).
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