Accord Israël–Syrie : présence tripartite sur le mont Hermon

Accord Israël–Syrie : présence tripartite sur le mont Hermon

Israël et la Syrie au bord d’un accord historique : une présence tripartite sur le mont Hermon pour sécuriser la frontière.

Selon plusieurs sources régionales concordantes, Israël et la Syrie seraient sur le point de conclure un accord de sécurité prévoyant une présence conjointe des forces israéliennes, syriennes et américaines sur des points stratégiques du sud syrien, notamment le mont Hermon.
Cet arrangement, qui rappelle l’esprit de l’accord de désengagement de 1974 tout en l’adaptant aux réalités post-Assad, marquerait un tournant majeur dans les relations entre deux États officiellement en guerre depuis 1948.

Le contexte : un vide sécuritaire né de la chute d’Assad

La chute du régime de Bachar al-Assad en décembre 2024 a profondément bouleversé les équilibres au sud de la Syrie. L’effondrement du pouvoir central, face à l’offensive des rebelles menés par Hayat Tahrir al-Sham (HTS), a laissé un vide que les forces israéliennes ont rapidement investi.
Dès le 8 décembre 2024, Tsahal a franchi la ligne de démarcation pour occuper la zone tampon démilitarisée établie par l’accord de 1974, ainsi que le versant syrien du mont Hermon — un sommet de 2 814 mètres, à la fois observatoire naturel et position stratégique clé.

L’accord de 1974, signé après la guerre du Kippour, avait instauré une zone tampon sous supervision onusienne. Israël s’était alors retiré du mont Hermon, restituant le contrôle à la Syrie.
Mais l’effondrement de l’armée syrienne et la montée de factions armées ont conduit Benjamin Netanyahou à déclarer “caduc” l’accord de 1974, justifiant une présence militaire israélienne renforcée pour empêcher toute infiltration iranienne ou djihadiste.

Depuis, Israël maintient un dispositif élargi de surveillance et d’opérations ciblées contre les réseaux pro-iraniens.
En parallèle, le nouveau président syrien, Ahmed al-Sharaa — ancien chef du HTS devenu dirigeant de la “Nouvelle Syrie” — multiplie les signaux d’ouverture et plaide pour un rétablissement des échanges sécuritaires “dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité syrienne”.

Les contours de l’accord : une surveillance tripartite inédite

Le 29 octobre 2025, Al-Arabiya rapporte qu’un responsable israélien a confirmé que les négociations entre Jérusalem, Damas et Washington sont entrées dans leur phase finale, avec un projet d’accord pour une présence conjointe Israël–Syrie–États-Unis sur plusieurs sites stratégiques, dont le mont Hermon.
Ce dispositif inclurait la création d’un comité de sécurité tripartite chargé de superviser la frontière et de prévenir tout affrontement non coordonné.
Selon la même source, il s’agirait d’une “mise à jour de l’armistice de 1974 avec des ajustements mineurs”, destinée à refléter la nouvelle réalité du terrain.

Les négociations, menées sous médiation américaine, prévoient un retrait progressif des troupes israéliennes de la zone tampon à condition que Damas s’engage à :

  • interdire toute présence iranienne ou milice étrangère dans le sud-ouest syrien ;
  • geler les déploiements militaires lourds à proximité du Golan ;
  • coopérer à la surveillance conjointe de la ligne Hermon-Quneitra.

Le rôle américain, pivot du dispositif, est déterminant : Washington entend sceller un accord avant 2026, dans le cadre d’une stratégie régionale de stabilisation post-Trump.
Des discussions exploratoires auraient déjà eu lieu à Londres et à Chypre entre le ministre israélien des Affaires stratégiques Ron Dermer et le ministre syrien Asaad al-Shaibani, préparant un cadre de coordination.

Pourquoi le mont Hermon concentre toutes les attentions

Le mont Hermon n’est pas qu’un symbole : il domine la plaine de la Bekaa, surplombe Damas et contrôle des sources hydriques cruciales pour les deux pays.
Pour Israël, il représente un atout de dissuasion et un poste d’observation essentiel face au Hezbollah.
Pour la Syrie, il incarne la reconquête de la souveraineté nationale, un enjeu vital pour le régime d’al-Sharaa, soucieux de consolider son autorité au sud du pays et de restaurer sa légitimité.
Cette reprise de contrôle, même partielle, serait un signal fort à la population syrienne et aux puissances arabes modérées que la Syrie “post-Assad” redevient un acteur d’État, et non une mosaïque de milices.

Un accord qui redessine l’échiquier régional

Pour Israël, cette coopération serait un gage de sécurité et un moyen d’isoler l’Iran de la frontière nord.
Pour la Syrie, elle offrirait un retour sur la scène diplomatique après une décennie d’isolement.
Et pour les États-Unis, elle constituerait une victoire stratégique : la démonstration qu’une approche de stabilisation pragmatique — fondée sur la sécurité avant la morale — peut produire des résultats concrets.

Les Émirats arabes unis et la Jordanie auraient également apporté leur soutien discret à cette initiative, estimant qu’elle pourrait servir de modèle à d’autres zones frontalières sensibles dans la région.

Vers une paix froide, ou un nouveau statu quo ?

Si cet accord se concrétise, il pourrait être la première étape vers une intégration progressive de la Syrie dans le cadre élargi des Accords d’Abraham, ouvrant la voie à une reconnaissance partielle, voire à des échanges économiques sous supervision américaine.
Mais les obstacles restent considérables : la fragilité du régime syrien, la méfiance israélienne, et la capacité limitée des États-Unis à garantir une application durable sur le terrain.

Entre scepticisme et espoir, le mont Hermon pourrait redevenir ce qu’il n’a plus été depuis un demi-siècle : un sommet d’observation, mais aussi un point d’équilibre.

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A propos Faraj Alexandre Rifai 371 Articles
Faraj Alexandre Rifai est un auteur et essayiste franco-syrien, auteur de "Un Syrien en Israël" fondateur de Moyen-Orient.fr et de l’initiative Ashteret.